Bienheureuse Anna Maria Giannetti Taigi
(Sienne 1769 – Rome 1837)
Tertiaire de l’Ordre de la Très Sainte Trinité et des captifs
Giovanna Cossu Merendino
La vie de la Bienheureuse Anna Maria Giannetti Taigi est une vie d’amour, la vie d’une femme libre au plus profond de son cœur pour suivre le Seigneur, dans sa condition d’épouse et de mère ; la vie d’une femme qui s’est sanctifiée dans le mariage, démontrant qu’il est possible de concilier les devoirs familiaux avec une vie spirituelle intense.
Elle est née le 29 mai 1769 à Sienne mais à cause de vicissitudes économiques son père Luigi Carlo Antonio Giannetti est contraint de se transférer à Rome avec sa femme Santa Maria Benvenuta Masi et la petite Anna Maria âgée de six ans. Il espérait y trouver un avenir meilleur pour sa famille.
Les conditions financières sont si désastreuses qu’ils doivent faire le voyage à pieds. Arrivés à Rome, leur premier désir est que la petite ait une éducation adéquate à son âge. Elle est donc inscrite à l’Ecole des « Maîtresses pieuses » dans le quartier Monti, où la famille a trouvé un modeste logement. C’est proche de l’Institut fondé par Sainte Lucie Filippini (1672-1732) qui a pour but premier « de faire progresser la culture religieuse, morale et sociale des filles du peuple ». Ces religieuses, qui éduqueront Anna Maria pendant 2 ans, lui apprendront à lire.
Dans un modeste atelier de couture, deux dames complèteront sa formation et lui apprendront les travaux de broderie et de couture, comme de coutume pour les filles de l’époque.
Se sentant habile dans ce travail, Anna Maria exprime son désir de travailler pour aider économiquement ses parents.
Elle est assumée comme femme de ménage par une dame qui est en relation d’amitié avec la famille Chigi, chez qui travaille comme majordome un certain Domenico Taigi, de Valtellina.
Anna Maria est belle et sensible, aux contours délicats. Elle est toujours joyeuse et cordiale. Elle travaille avec joie et altruisme, à la grande satisfaction de sa patronne. Elle fréquente régulièrement la paroisse. Elle est assidue à la prière et aux œuvres de charité.
Le jeune Domenico Taigi est attiré par les manières douces et gentilles de la jeune fille qu’il voit chaque jour en portant le courrier de la famille Chigi à sa patronne. Il lui manifeste le désir de l’épouser.
Reconnaissant en lui les qualités qu’elle recherchait, avec le consentement de ses parents, après de brèves fiançailles, le 7 janvier 1790, les jeunes s’unissent par le mariage en l’église St Marcel al Corso (Rome) et vont habiter dans un petit appartement mis à leur disposition par la famille Chigi.
Pendant tout ce temps, la grâce de Dieu travaille le cœur d’Anna Maria. Un jour qu’elle se promène, élégamment vêtue, avec son mari à la basilique St Pierre, elle rencontre un religieux qui, la voyant, entend une voix intérieure qui l’invite à observer cette jeune femme. Il est convaincu qu’elle sera un jour sa pénitente et qu’il la guidera à l’état de perfection.
Anna Maria est touchée par le regard profond du religieux et ressent dans son cœur un grand désir de rejoindre la perfection spirituelle. Elle se confiera à ce religieux qui l’aidera à répondre à l’appel divin.
Elle se défait de toute vanité, revêt des habits plus simples et plus modestes. Elle entreprend une vie réservée, austère et pénitente, décidée à dépasser les préjugés négatifs de son entourage.
Domenico Taigi accepte ces changements et accueillera toujours les désirs de son épouse qu’il aime, à condition que la vie familiale se poursuive dans la sérénité et la tranquillité.
Sept enfants naîtront de ce mariage mais Anna Maria pleurera la mort prématurée de quatre enfants. Le cinquième mourra après sa mère. Anna Maria est une mère attentive, prévenante et scrupuleuse. Elle donne elle-même les premières notions de la doctrine chrétienne. Pour que les enfants soient plus instruits, elle les confie soit aux religieuses soit à Don Raffaele Natali ou au Père Settimio Poggiarelli, prieur de Santa Maria del Popolo.
Les jours de fêtes, elle accompagne ses enfants à l’église et assiste avec son mari à la messe. Elle emmène les enfants à l’hôpital pour les sensibiliser à la souffrance des autres et leur inculquer la charité envers les pauvres. Elle en donne l’exemple.
Elle aime ses enfants de façon impartiale et si elle doit les punir ou les corriger, la correction est proportionnée à l’âge ou à la faute.
Anna Maria est un exemple, un guide, un point de référence pour la famille ; cette vie familiale exemplaire est enracinée dans une relation sereine qu’elle réussit à instaurer avec son mari malgré la différence des caractères.
Sans négliger ses devoirs d’épouse et de mère, Anna Maria, avec abnégation, se donne entièrement au Seigneur, se privant même des divertissements les plus innocents, et unit à une vie contemplative un apostolat d’œuvres de charité.
Elle assiste à la messe chaque jour et même à plusieurs messes selon ses engagements ; elle fréquente le sacrement de réconciliation tous les 8 jours et reçoit la communion assidument avec la permission et la conduite de son directeur spirituel.
Elle est dévote de tous les saints et prie particulièrement la Sainte Vierge et la Sainte Trinité. Elle vit constamment en la présence de Dieu, dirigeant vers Lui toutes ses pensées et ses actions.
Elle est réservée pour être plus recueillie en Dieu et pour ne pas être observée ou admirée, elle change parfois d’église, préférant les églises les plus éloignées et moins fréquentées. Consciente de la force de la prière publique, elle prie fréquemment devant l’image de Jésus Nazaréen en l’église San Carlino alle Quattro Fontane et à Saint Jean du Latran pour obtenir les indulgences promulguées par les Pontifes Pie VII et Grégoire XVI, chez qui elle vénère la personne de Jésus-Christ.
Dans sa petite et pauvre maison, il y a un petit autel, près duquel la famille se recueille le soir pour la prière commune. Il y a toujours une lampe allumée devant le cadre de la Vierge de Pitié dont Anna Maria est très attachée. Au fil du temps, les problèmes de santé augmentant jusqu’ à l’immobilisation totale dans son lit, ses amis prêtres célèbreront la messe quotidienne sur cet autel.
Tranquille et se soumettant à la volonté divine, dans les difficultés, elle invite les siens à l’espérance et à la médiation de la Vierge et des Saints.
La famille est pauvre et nombreuse mais tous ceux qui frappent à la porte sont accueillis et réconfortés. On leur procure avec amour le nécessaire pour soulager leur souffrance. Sa charité la porte à supporter patiemment les offenses, à pardonner les injures et calomnies, à sourire et faire la charité à qui la maltraite.
Infatigable au travail, elle espère dans la Divine Providence et elle s’humilie à demander elle-même l’aumône pour les pauvres quand ses ressources sont insuffisantes.
Elle reconnaît Jésus Christ dans les pauvres et les souffrants. Quand elle voit dans la rue une personne abandonnée, surtout en hiver, elle la porte chez elle, la nourrit et la revêt des habits de ses enfants, tout en l’encourageant à accepter sa pénible situation pour l’amour de Dieu.
Sa maison est visitée par des religieux, des hauts prélats, des évêques, des cardinaux, des princes et des princesses, par des personnes de toutes conditions sociales, qui aiment la consulter, lui demander son intercession, sa prière pour le suffrage des âmes ou pour apaiser les âmes par des conseils divers.
Considérant le Souverain Pontife comme le Vicaire du Christ sur terre, Anna Maria prie à ses intentions et pour les besoins de l’Eglise, surtout pendant le pénible pontificat de Pie VII, troublé par l’arrogance des soldats de Napoléon et l’exil forcé du pape.
Anna Maria prie beaucoup pour la restauration de l’ordre dans l’Eglise et le retour du Pape au Quirinal, siège du Saint Père à l’époque. Elle prédit son retour et sa première messe pontificale alors que les circonstances politiques en font craindre le pire.
Sous la direction spirituelle du Père Ferdinand, trinitaire de San Carlino, le 23 février 1808, elle devient Tertiaire trinitaire, après avoir demandé et obtenu le consentement de son mari. Le jour de la St Etienne de la même année, elle revêt l’habit blanc avec la croix rouge et bleue qu’elle portera quotidiennement jusqu’à la grossesse de sa dernière fille Maria. Dès lors, sous ses modestes habits, elle portera le scapulaire bicolore, conciliant ainsi ses devoirs de Tertiaire avec les normes prudentes de mère de famille.
Le message
Le message d’Anna Maria est un message d’amour, un amour gratuit et inconditionnel envers Dieu vers qui ses pensées, ses prières et actions sont tournées. Sa vie a été intense, forte et douloureuse mais illuminée par une grande foi qui l’a aidée à dépasser toutes les difficultés.
Anna Maria nous montre comment mettre en pratique l’enseignement de l’Evangile dans sa condition d’épouse et de mère de famille, comment s’engager dans le social malgré les problèmes de santé en se confiant simplement et entièrement à Dieu, en lui ouvrant son cœur, en disant « Me voici » comme le fit la Vierge Marie.
Anna Maria ne pense jamais à ses souffrances mais chaque douleur est un encouragement à s’immoler pour donner plus aux autres, pour qui elle a toujours un mot de réconfort, un conseil, une prière.
Dieu récompensa sa fidélité en lui octroyant d’abondantes grâces et des dons spirituels qu’elle mit au service du prochain. En particulier, il lui fit don du « Soleil lumineux » qui l’accompagnera jour et nuit pendant 47 ans. Ce sera son guide, sa lumière et sa force.
D’un cœur généreux et humble, elle garde jalousement ce don en supportant les calomnies et le mépris grâce à la prière et à la pénitence.
D’autres messages sont les messages de charité, de solidarité et d’altruisme. Elle renonce au temps de repos pour travailler de nuit afin de soutenir les pauvres et les membres de sa famille dans le besoin.
Quand meurt le mari de sa fille Sofia, elle recueille chez elle sa fille et ses six enfants pour en prendre soin.
Sa profonde humilité et sa simplicité sont indescriptibles. Humilité et simplicité qui ne sont plus appréciées aujourd’hui mais qui ont permis à Anna Maria de donner la juste valeur aux choses qui comptent.
Elle nous offre encore un message de liberté, cette liberté que seul l’amour de Dieu peut donner. Détachée des biens terrestres, elle refuse une maison somptueuse offerte par la reine Maria Luisa, son amie, et par le cardinal Pedicini, afin de rester pauvre parmi les pauvres avec la liberté de suivre et d’aimer Dieu à son image et ressemblance, en contemplant quotidiennement la croix de la Rédemption.
Une humble femme du peuple, illettrée, nous démontre que l’amour gratuit paye toujours. Enrichie de tant de dons et de vertus, elle a le privilège d’être choisie par le Seigneur pour manifester au monde sa miséricorde.
En 1852 commence le procès de reconnaissance officielle des vertus héroïques d’Anna Maria Giannetti Taigi ; le 30 mai 1920, fête de la Très Sainte Trinité, le pape Benoît XV la déclare bienheureuse.
En notre époque de crise des valeurs, de divorces, d’avortements, d’expériences sur les embryons humains, d’unions irrégulières, la figure de cette femme est plus qu’actuelle. Sa fidélité et la force avec laquelle elle a vécu sa vie familiale compliquée sont un exemple précieux, un appel aux valeurs familiales, à l’amour des petites choses, à l’amour de Dieu.
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Héritage :
- Anna Maria est une des saintes patronnes de l’Action Catholique italienne.
- Anne Maria est invoquée pour les familles, les couples en difficulté et par les femmes en désir d’enfant.
- Son corps se trouve dans une chapelle de la basilique Saint Chrysogone de Rome. Les reliques et objets de sa vie occupent deux pièces de la basilique.
- Sa vie étonnante a été traduite en plusieurs langues. De nombreuses demandes la concernant arrivent chaque semaine chez le procurateur de l’Ordre et à la basilique confiée aux Trinitaires.
Sa canonisation nécessite un miracle reconnu. Que Dieu nous l’accorde par son intercession !
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