Ainé de 11 enfants, il naquit de Simon et Marie, fervents chrétiens, le 11 mai 1901, dans la bourgade de Dima, Espagne. Le 11 décembre 1917, il revêtit l’habit trinitaire et commença son noviciat au couvent-sanctuaire de la Vierge Bien Aparecida. D’Espagne, il arriva à Rome en octobre 1919 pour étudier à l’Université Grégorienne, au Couvent de San Carlino des Pères trinitaires espagnols. Il y fera sa profession solennelle le 24 octobre 1924. Il sera ordonné prêtre le 9 octobre 1924, avant même de terminer ses études théologiques. En Juin 1926, il ressentit les premiers symptômes de la tuberculose, déjà à un stade avancé. Il meurt le 7 avril 1927 dans le couvent trinitaire de Belmonte en Espagne. Le 30 octobre 1983, il fut proclamé Bienheureux par le Pape Jean-Paul II. Sa mémoire liturgique est célébrée le 11 mai.
Le grand musicien et compositeur Mozart mourut à 35 ans. Le compositeur du Bel Canto italien Vincent Bellini mourut à 33 ans. Sainte Thérèse de Lisieux mourut à 24 ans. Sainte Elisabeth de la Trinité mourut à 26 ans. Notre frère Bienheureux Dominique Iturrate mourut à 26 ans. Vie très brève ! On dit quelque fois que s’ils avaient vécu plus longtemps, ils auraient fait plus. NON, car ce sont de vrais génies et dans leur brève existence, ils ont TOUT fait, c’est-à-dire qu’ils ont réalisé pleinement leur vie. La vie ne se mesure pas aux années ou aux prodiges accomplis mais à l’intensité avec laquelle elle est vécue. Les réalisations, le chemin vers la sainteté sont le fruit de cette intensité avec laquelle ils ont vécu leur brève existence.
Si on peut utiliser un mot pour définir la vie de notre confrère Dominique, c’est celui-ci : intensité. Intensité en tout ce qu’il faisait. De fait, à 20 ans, il avait appris l’importance de sanctifier le temps présent, la vie ordinaire vécue dans la foi. Cet objectif de vie fut constamment renouvelé et même sous forme de vœu. En 1924, il écrivait : « Je chercherai à accomplir tout travail, même le plus insignifiant, dans un esprit d’amour » et encore : « …Ce que vous voulez de moi, ô Dieu, c’est un grand amour en toutes mes actions, sans que les autres ne s’en aperçoivent ». Après un an de mise à l’épreuve, son directeur spirituel lui permit de faire le vœu de « toujours choisir le plus parfait » dans ses actions quotidiennes.
C’est pourquoi il était ordonné dans sa journée, tout orienté à ses études et à la charité envers ses confrères, surtout les malades ou ceux qui avaient besoin d’aide dans leurs études. Il était brillant dans ses études, au point de susciter l’admiration de ses professeurs de l’Université Grégorienne.
Durant ses dernières études au collège d’Algorta (Espagne) et au noviciat, il vécut de difficiles épreuves spirituelles comme il le confessa à son père spirituel : grande aridité d’esprit, profonde obscurité, doute et profonde amertume. Il sentait comme une voix intérieure qui lui reprochait son imperfection. Il se découvrait de nouveaux défauts et pensait ainsi être destiné à la condamnation. Il passa lui-aussi par la nuit de l’esprit… la voix qui le rabrouait… était la purification dont parle St Jean de la Croix. Il se dédia plus encore à la prière, à la pénitence. Il trouva consolation dans la Croix. Cette lutte intérieure se termina le jour de sa profession simple quand il reçut, selon ses propres dires, « le don de la tranquillité ».
Il ne faisait rien d’extraordinaire : l’extraordinaire chez lui était la constance, la fermeté de bien accomplir son devoir, chaque jour, en été ou en hiver, à chaque heure, en santé ou malade, et toujours avec un simple sourire. C’était une fidélité quotidienne envers le Seigneur. C’est ce qui convainquit les juges à son procès pour voter à l’unanimité sa béatification.
Ce style de vie le portait à se considérer consacré totalement à Jésus et ainsi : « dorénavant, disait-il, je dois me considérer comme lui appartenant de façon que quoi qu’il m’arrive, de bien ou de moins bien, de favorable ou contre ma volonté, je dirai : Je suis à Jésus et à Marie, ils peuvent faire de moi ce qu’ils voudront ». Cet abandon total à la volonté de Dieu a été le signe le plus grand de sa sainteté. Le 5 janvier 1927, peu avant sa mort, il disait : « Dans la maison de Dieu, il y a plusieurs devoirs à accomplir ; ce qui compte c’est de faire sa volonté. Dieu cueille certains à l’âge tendre, à d’autres il demande beaucoup et un long apostolat. Tout est grâce. Tout est gain, à moins que l’on soit négligent ». Notre conformité à la volonté divine doit être totale, sans réserve et constante. Accomplir la volonté de Dieu dans les petites et grandes choses nous porte à vivre avec sagesse les différentes situations de la vie.
Quand le médecin lui donne la nouvelle de sa maladie incurable – tuberculose pulmonaire due à une pleurésie non soignée, de laquelle il n’avait senti aucun symptôme à cause de sa forte constitution-, il comprit qu’il était condamné à mourir si jeune… après avoir tant étudié pour propager le règne de Dieu et… Ce fut le sentiment qui inonda son âme… pour un court moment, car habitué au sacrifice et à la domination des sentiments pour laquelle il avait tant lutté, il réagit aussitôt et se jeta dans les bras de Dieu comme il l’écrivit au Père Antonino, son père spirituel : « Quand j’ai appris la réalité du mal, j’ai eu un moment de tristesse parce que je m’étais soigneusement préparé à propager la dévotion à la très Sainte Trinité et tout s’évanouissait d’un coup. Quand je me suis aperçu que ce triste sentiment voulait envahir mon esprit, je me suis mis entièrement entre les mains de Dieu et j’ai accepté sa volonté juste et adorable ». L’accomplissement fidèle de la volonté de Dieu est un objectif qui atteint des hauts sommets, surtout dans les dernières années de sa vie.
C’est ce qu’ont observé et déclaré tous ceux qui ont vécu avec lui, surtout pendant ses longues études à San Carlino, Rome. Cette attitude lui permettait de vivre recueilli en la présence de Dieu, sans grands efforts et sans distraction de ce qui se passait autour de lui dans sa cordialité et son attention aux autres, particulièrement envers les confrères malades. Comme la communauté de San Carlino était nombreuse, il y avait toujours des malades.
PROJETS d’un jeune qui regarde toujours en avant pour accomplir au mieux la volonté du Seigneur :
- Se spécialiser en psychologie pour la formation des jeunes
- Etudier la mariologie pour aimer toujours plus la Vierge qu’il aimait comme sa Mère.
- Être missionnaire pour offrir à tous le don de la foi. C’est pourquoi, il exposa au Père provincial la convenance d’ouvrir une maison en Afrique ou en Amérique Latine, en s’offrant personnellement pour cet apostolat. Mais les supérieurs, évaluant ses grandes qualités de formateur, au Chapitre provincial de 1926, le nommèrent Maître des étudiants trinitaires, à San Carlino aux Quatre Fontaines, Rome.
De ceci apparait que tout pour lui était en vue du service.
LES GRANDES AMOURS qui ont marqué sa vie brève et intense :
- La Très Sainte TRINITE, qu’il sentait comme un Dieu intime et proche. Quand le docteur Morelli lui communiqua la gravité de sa maladie, il fut ébranlé mais réagit immédiatement en acceptant le sacrifice et murmura : « Je m’étais préparé soigneusement à propager la dévotion en la Très Sainte Trinité ». Il en avait fait une raison de vivre et une mission. En 1926, avant même d’avoir terminé ses études, il avait écrit 4 articles dans la revue Le Saint Trisagion, dans lesquels il insistait sur la filiation divine et l’union intime d’amour et d’amitié avec la Très Sainte Trinité. Parmi d’autres, voici une admirable affirmation : « Dieu est en l’homme, l’enivrant du vin de son amour ; la volonté de l’homme enivrée de la douceur de l’Amour incréé se fond dans la volonté divine et l’âme se transforme et en quelle que sorte se divinise ».
Il parlait souvent du Mystère de la Trinité et se lamentait du peu qu’on en écrivait et de l’ignorance du peuple sur ce sujet. Il était en avance sur son temps car c’est le Concile Vatican II qui reviendrait à ce thème fondamental de notre foi. Le jeune Dominique avait raison et a encore raison aujourd’hui ; l’Eglise a un grave déficit dans l’évangélisation qu’elle tente de combler : la foi de la majorité du peuple de Dieu ne touche pas le mystère trinitaire, elle s’arrête à un christocentrisme et une pneumatologie exaspérés. Je l’ai toujours dit dans mes années missionnaires au Brésil mais je le constate partout ! Notre foi est christo-trinitaire, dans laquelle Jésus par l’Esprit Saint est le chemin qui conduit au Père. Il apparait ainsi que Jésus est le Chemin mais l’objectif est la Trinité.
- L’HUMANITE DU CHRIST rédempteur qui nous conduit à la Trinité. Il confessait que l’étude de l’Incarnation et de la Rédemption lui donnait beaucoup de joie et il disait qu’il pouvait imaginer quelle serait la joie du paradis. C’est le « centuple » sur la terre dont parle l’Evangile de la fête du Bienheureux.
- L’EUCHARISTIE l’enchantait dès son enfance et enchantait ceux qui le voyaient servir et participer à la messe. Il était toujours disposé à servir comme enfant ou étudiant à San Carlino et même pendant la période des examens, comme l’ont noté ses confrères étudiants. Il passait des heures et parfois des nuits, absorbé devant le Saint Sacrement. C’était aussi son nom religieux : Frère Dominique du Très Saint Sacrement. Ainsi l’a trouvé Mgr Salotti, futur cardinal, lors de ses fréquentes visites à la chapelle de San Carlino. A San Carlino, encore étudiant, il demanda au ministre la communion journalière pour les malades, ce qui n’était pas l’habitude en ce temps-là. Et avec l’Eucharistie, son admiration pour le SACERDOCE qu’il vivait lié à la médiation du Christ rédempteur. Tout cela le portait à vivre chaque eucharistie comme un acte d’immolation personnelle, uni à la Victime Suprême, en faveur des hommes. Il écrivit de belles pages sur cela, comme cette lettre à ses parents après son ordination sacerdotale. Il a compris le sacerdoce comme association au sacrifice rédempteur du Christ et essentiellement comme service.
- LA DEVOTION A MARIE, qu’il aimait comme sa mère et qu’il associe à l’humanité du Christ et, quelque fois, à la Trinité. Après la nuit obscure du noviciat, il s’adresse à elle pour la remercier de l’avoir aidé quand il était « au bord du précipice ». Il en parle avec tous, convaincu que « bon et sûr est ce chemin : aller au Fils par la Mère ».
Le 24 mars 1927 ; il écrit au père provincial : « Mon état de santé est très grave. Cela fait déjà sept, huit jours que la fièvre est élevée : 40 la nuit ; 38-39 le jour, accompagnée de fortes douleurs. Bientôt je chanterai l’Alléluia avec l’Agneau Divin et avec Marie notre Mère ». Il meurt le 7 avril, veille de la Vierge des Douleurs, en regardant le Crucifix, avec son rosaire en main en disant : « Me voici, mon Dieu ! ».
On ne peut lire la biographie de ce confrère, qui a rejoint la sainteté simplement en faisant « les choses communes de façon non commune » et avec une grande intensité, sans émotion et sans larme !
P. Vincenzo Frisullo, osst
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